vendredi 16 mars 2012

Meine Kältekammer (ma chambre froide) - Joël Pommerat - Puppentheater Halle


(Photo Angela Baugmart)



Ma chambre froide est la chronique d'un magasin où les employés doivent subir les assauts de leur patron. Harcèlement moral, sexuel, il n'y a aucun doute sur les qualifications juridiques du comportement de Blocq. Mais lorsque ce dernier découvre qu'il est atteint d'un mal incurable, il préfère céder les parts de  sa société à ses  employés  qu'à sa famille qu'il déteste. En contrepartie, ceux ci devront consacrer annuellement une journée à honorer sa mémoire, Estelle une de ses employés propose de monter un spectacle qui retrace les grands évènements de sa vie. Ainsi le groupe des "héritiers" se retrouve non seulement propriétaire du magasin mais également d'une cimenterie, d'un abattoir, et d'un bar de luxe qui se révèle être très rapidement un bar à putes.

Face à leurs nouvelles responsabilités, il leur faut prendre des décisions dans la gestion, prévoir l'avenir, ils se retrouvent désarçonnés,  confrontés rapidement aux difficultés,  quand en plus il leur faut préparer un spectacle pour ne pas rendre caduque le contrat...
Découpés en séquences ce qui donne un aspect mécanique au récit comme si les événements se déroulaient dans une suite logique et implacable sans aucun espace de liberté pour les différents protagonistes , cette histoire peut être vue comme celle du capitalisme, c'est l'histoire d'une aliénation. C'est sombre et  pessimiste, totalement désespérant. Parmi ces personnages se dégage Estelle une sorte de sainte du travail, toujours prête à secourir ses camarades, femme courage qui subit en silence les coups de son mari, chacun en profite pour lui refiler ses corvées. Mais derrière ce visage d'ange se cache un personnage bien plus complexe à la personnalité double révélant une fascination pour le mal.
Ils finiront par céder toutes les parts de leur société sans en tirer profit, pour revenir à leur condition première.
Passionnante rencontre que celle entre Joel Pommerat et sa compagnie "Louis Brouillard" et le Puppentheater de Halle de Christoph Werner. L'écriture contemporaine ancrée dans la réalité sociale de Joel Pommerat trouve toute sa place dans ce théâtre où les marionnettes se mélangent au jeu des acteurs, il renouvelle totalement le genre. Les marionnettes hyper réalistes se confondent parfaitement aux acteurs et très rapidement nous ne les distinguons plus  des possibilités infinies au metteur en scène, notamment pour rendre compte du monde onirique de Estelle. Les sous titres idéalement placés sur le plateau ne sont pas un problème pour ceux qui comme nous ne connaissent pas la langue allemande. C'est un spectacle d'une grande beauté qui montre combien le théâtre est un art vivant portant  un  regard sans concession sur notre époque, Joel Pommerat en est un de ses grands auteurs.

C'est avec grand plaisir et une certaine impatience que nous nous rendrons aux ateliers Berthier du Théâtre de l'Odéeon pour assister à la version mise en scène par Joel Pommerat de la compagnie Louis Brouillard.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

LinkWithin

Related Posts Plugin for WordPress, Blogger...