lundi 1 avril 2013

Le cri - Michelangelo Antonioni

Aldo, un ouvrier partage depuis des années sa vie avec Irma dont le mari est parti depuis des années  en Australie. Ils ont une fille Rosanna. Le jour où elle apprend le décès  de son époux, Irma annonce à Aldo son désir de le quitter pour vivre avec un autre homme.
Désespéré Aldo part avec sa fille, il erre dans la campagne de femmes en femmes, de boulot en boulot, il finit par renvoyer Rosanna chez sa mère, continuant seul son errance. Mais il ne peut oublier Irma, il retourne dans son village. Il désespère alors de voir que son ancienne compagne a eu un nouvel enfant ...

Aldo passe les pieds dans la boue tout le long du film, embourbé comme son âme ... Antonioni suit cet homme qui erre à travers les plaines du Po, nous offrant des perspectives sublimes dans une Italie de l'après guerre en pleine reconstruction où l'influence américaine comme  à se faire sentir. Un long road movie austère servi par une photographie extraordinaire, où les paysages sans fin reflètent la mélancolie du personnage, il décrit sans tabou la détresse sentimentale de l'ouvrier, une représentation peu courante dans le cinéma italien préférant mettre en avant la virilité de ses travailleurs.

Antonioni jusque là ne s'était pas intéressé à la classe ouvrière, nous avons retrouvé des propos tenus par le cinéaste au sujet de ce film:

"Quelle différence y-a-t-il entre un être humain qui fait un métier et un être humain qui en fait un autre, entre un être humain qui a de l'argent et un qui n'en a pas? Je dirais que les problèmes sentimentaux et psychologique au niveau de la classe ouvrière sont justement rendus plus complexes par le manque d'argent; si un homme qui n'a pas de problèmes financiers peut disposer de lui-même et des on temps pour s'occuper de certaines choses et pour résoudre certains problèmes de nature sentimentale, par une rencontre, ou bien en rejoignant une personne qui est loin, un ouvrier ne peut pas se le permettre. Et donc, le mécanisme de sa vie le contraint à renoncer à certains gestes, à certains actes qu'il aurait voulu faire et qu'il ne peut pas faire. Les problèmes sont les mêmes, et la poussée, j'entends l'investissement sentimental et passionnel chez un ouvrier, devient peut-être encore plus forte justement à cause de ces contraintes pratiques dans lesquelles il se débat."

(...)

"Les critiques français ont parlé d'une nouvelle formule: le néoralisme intérieur. Je n'avais jamais pensé à donner un nom ce qui pour moi a toujours été, depuis l'époque de ce documentaire sur les malades mentaux, une nécessite: regarder à l'intérieur de l'homme, quels sentiments l'agitent, quelles pensées , dans son chemin vers le bonheur ou le malheur ou la mort."

Sublime !

Nous avons trouvé les propos du cinéaste dans l'ouvrage : Le cinéma italien de Jean A. Gili (édition de la Martinière)

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