vendredi 21 août 2015

Ernesto Sabato - Le tunnel

"Il suffira de dire que je suis Juan Pablo Castel le peintre qui a tué Maria Iribarne; je suppose que le procès est resté dans toutes les mémoires et qu'il n'est pas nécessaire d'en dire plus sur ma personne."
Aucune surprise à attendre puisque l'auteur dit nous livrer tout  en ouverture de roman, mais il montre un vrai talent pour stimuler la curiosité du lecteur qui ne peut se satisfaire de ce simple aveu. Chronique d'un assassin, d'un homme rongé par la jalousie qui  le mène à tuer celle qu'il aime . Juan Pablo Castel est un peintre reconnu mais aussi un misanthrope. Lors du salon de peinture de 1946, il présente un tableau "la maternité" mais, il n'attend pas grand chose de cette exposition détestant cordialement toutes critiques d'art même si elles lui sont généralement favorables.  Il découvre une jeune femme observant attentivement son œuvre, le regard attiré plus particulièrement par une scène de second plan d'une femme regardant la mer par la fenêtre d'une maison, une scène que personne n'a remarqué... Cela a le don de  l'émouvoir, de créer une connivence qu'il n'a jamais connue  avec une autre.
Il perd la jeune femme de vue mais le hasard lui permet de la retrouver, de s'imposer à elle alors qu'elle est mariée à un homme aveugle. Ils s'aiment et il voudrait que cet amour soit exclusif, chaque rencontre est l'occasion d'un interrogatoire, il se repend avant de replonger dans la jalousie excessive. La jeune femme décide de chercher le calme dans l'hacienda d'un cousin, il la retrouve.... Une jalousie sans fin qui mène le peintre à tuer celle qu'il aime.
C'est un court roman qui se lit d'une seule traite ; on se lance dans la confession du criminel dévoré par la jalousie, nous découvrons le système d'un homme qui a perdu le sens commun pour qui, tout évènement est utilisé pour nourrir la jalousie, créant un véritable chaos , un monde absurde sans issue. Ecrit dans les années 40 quand l'Argentine  confrontée à une série de crises subissait  la violence au quotidien, cet ouvrage développe une pensée reprise plus tard par l'auteur dans son essai Hommes et engrenages:

"L'être humain semble se trouver dans le monde comme un étranger solitaire et désemparé."

Le tunnel est un texte magnifique sur incommunicabilité, la solitude de l’être humain, il n'est pas étonnant qu'il est enthousiasmé Albert Camus tant ce texte est proche par ses thèmes à celui de l'étranger... Un roman phare de la littérature argentine du XX° siècle d'un auteur majeur au coté de Jorge Luis Borges !

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